Théodore PLONKA, ouvrier boulanger et capitaine de maquis
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Né le 17 avril 1921 à Montceau-les-Mines, dans le quartier de la Saule, il est le 6ème des sept enfants d'une famille de mineurs polonais immigrés. Venant de Westphalie, le père Jozef Plonka a été cruellement blessé au visage durant la guerre de 14-18 ; il compte parmi les premiers Polonais embauchés aux mines de Blanzy, division des Alouettes, le 7 octobre 1920. La famille réside à la Saule et Théodore fréquente l'école primaire française de la Lande. A l'âge de 13 ans, il est placé comme apprenti chez Alfred Marache, boulanger à Lucy. Devenu bon ouvrier boulanger, il travaille successivement chez Lorcet (rue d'Autun), chez Moneret, à Savigny. |
Ayant acquis automatiquement la nationalité française, il est mobilisé au printemps 1940. A son retour, après la débâcle de juin 40, il est embauché à la boulangerie de la coopérative de la Lande ; mais le jeune homme rêve d'une vie plus active : le 25 mai 1941, il s'engage pour 4 ans dans l'armée d'armistice, que les vainqueurs Allemands avaient concédée à la France de Pétain ; le 5 juin, il arrive au 10ème RAC (Régiment d'Artillerie coloniale), d'abord à Montauban, puis dans la région marseillaise ; il y excelle dans les activités sportives et le service des armes. Une mésaventure marque cette période : lors d'une permission à Montceau, en zone occupée, il est arrêté par les douaniers allemands en franchissant la ligne de démarcation et écope de 2 mois de prison ! Mais l'aventure militaire prend rapidement fin avec l'invasion de la zone Sud par la Wehrmacht, le 11 novembre 1942, et la dissolution consécutive de l'armée de l'armistice !
Placé en permission renouvelable le 30 novembre 1942, Théodore revient à Montceau où il reprend son métier de boulanger, cette fois chez Mme Jankowski, aux Gautherets. Il continue de résider chez sa mère à la Saule et soutient financièrement la famille, qui a payé un lourd tribut à la guerre : de ses frères, Thomas, engagé dans la Légion, a été tué en Syrie, Martin est prisonnier en Allemagne (il sera plus tard tué en Indochine), François est bientôt requis par le STO ; quant à Léon, il se remet d'une grave blessure reçue pendant la campagne de 1940.
Dans le quartier de la Saule, le patriotisme de Théodore et sa personnalité ont vite attiré l'attention du noyau activiste de l'organisation communiste polonaise qui se met en place, sous la conduite d'émissaires parisiens relevant de la MOI (Main d'Oeuvre Immigrée). Fin 1942, il est sollicité pour animer une activité clandestine d'entraînement aux arts martiaux d'un groupe de jeunes, qui se déroule dans un local de la coopérative. Les mêmes distribueront bientôt la propagande et réaliseront divers sabotages… Mais les rafles policières de février 1944 paralysent le groupe ; alors que bien des Montcelliens, polonais, italiens ou français, partent alors au maquis dans l'arrière-pays chalonnais, Théodore Plonka suit un trajet bien particulier : le dirigeant de la MOI Boleslaw Maslankiewicz (voir biographie), familier avec les clandestins de la Saule, le désigne, en mars 1944, pour servir d'interprète et de guide à un maquis soviétique que l'appareil central de la MOI soutient depuis Paris ; ces Soviétiques, évadés de camps de travail allemands ou déserteurs de la Wehrmacht, forment un maquis itinérant, entre les pentes du Mont-Beuvray et Cercy-la-Tour, réalisant quelques coups de main dans l'Est du département de la Nièvre. Théodore connaîtra alors un temps de vie aventureuse, qui le conduira jusqu'à Paris livrer un colis d'armes aux FTP-MOI de la capitale...
Après le Débarquement, le groupe des Soviétiques est fusionné avec le maquis FTP polonais que Mieczyslaw Bargiel regroupe près d'Aigrefeuille, sur les pentes d'Uchon, dans le cadre du grand maquis FTP Valmy formé par Paul Dessolin, Léon Allain et Louis Boussin. C'est ainsi qu'avec ses Russes Théodore Plonka intègre lui aussi le bataillon FTP polonais du bassin-minier ; il y portera un étrange nom de guerre : "le Type". Immédiatement, son dynamisme et son savoir militaire le désignent comme officier, chargé de la structuration et de l'entraînement militaire de l'unité. Il est promu capitaine FFI en juillet 1944 et devient l'adjoint direct de Bargiel à la tête du bataillon Mickiewicz.
- Théodore Plonka (à Gauche) avec les officiers du bataillon Mickiewicz -
Parmi les actions auxquelles il participe directement, citons la bataille d'Uchon, le 15 juin 1944, où il dirige le groupe franc polonais, le combat d'Etang-sur-Arroux, le 9 août 1944, où il commande un convoi parti pour saboter la raffinerie des Télots (voir ici), près d'Autun. Accrochés par la garnison allemande dans la traversée d'Etang, les résistants auront trois tués, tous 3 soviétiques, dont le sacrifice est rappelé par une plaque de marbre fixée sur le parapet du pont traversant l'Arroux. Il dirige l'assaut des compagnies polonaises sur Autun, lors de l'attaque menée par le régiment Valmy pour la libération de la ville, le 8 septembre 1944, action au cours de laquelle son camarade, le chef de la 3ème compagnie, Jan Kocik, est tué à son côté.
La libération venue, et après le départ de Bargiel pour Paris, début janvier 1945, Théodore Plonka prendra un temps le commandement des 450 hommes du bataillon polonais, alors que celui-ci est cantonné au château de Cypierre, près de Paray-le-Monial, puis à Besançon, en attente de son intégration à la première Armée française (voir article sur cette intégration).
Mais les enjeux politiques des forces FTP polonaises au service du nouveau pouvoir que Staline installe à Varsovie ne sont plus du goût de Théodore, qui quitte l'armée. Les tourments de l'époque, son implication dans un "faux maquis" en 1945, vont l'éloigner longtemps de la Saône-et-Loire ; il reviendra cependant à Montceau vivre sa retraite. Ceux qui l'auront connu alors garderont le souvenir d'un homme affable et doux, plus en phase avec le jeune boulanger des origines, qu'avec l'impétueux maquisard FTP-MOI.
- Théodore Plonka lors d'un entretien en 2009, -
avec son camarade de l'école de la Lande, Louis Pierre,
ancien résistant FTP du maquis de Collonge
Théodore Plonka est mort à Montceau, le 5 août 2011 ; avec lui disparaissait l'un des derniers dirigeants des maquis de la Libération…
voir article du Journal de Saône-et-Loire
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